Sur la nécessité d'une présence de proximité
Par
définition, le malade fibromyalgique est limité
dans ses déplacements. Ceci est vrai pour le bénévole dassociation, malade
lui-même, qui, parce quil a des compétences, des motivations, fait déjà, et
quand même, partie dun groupe
; il investit son temps et son énergie
dans laction associative. Les limites physiques sont vites atteintes et il faut
donc, très tôt, apprendre à les connaître. Le regroupement de plusieurs personnes peut
permettre une continuité dans laction associative. La « politique »
déterminée par lAssemblée Générale et le Conseil dAdministration doit
être la ligne directrice qui détermine le comportement de chacun des bénévoles. Le
bénévolat ne peut pas être que lexpression de plusieurs bonnes volontés mises
côte à côte. Les divergences auront vite fait de créer le conflit. Il suffit pour cela
de regarder le nombre dassociations qui, de Président(e)s en nouveaux bureaux, ont
fini par nêtre quune enveloppe vide. Les conflits ont provoqué leffet
subversif que toute désunion peut entraîner. Les adhérents séloignent, les
partenaires sociaux nont aucune confiance.
La nécessaire unité ne peut se
faire que si lassociation permet des rencontres régulières de ses élus et un
débat permanent entre eux et avec ses adhérents.
Pour cela, il nest pas
envisageable dêtre trop dispersé géographiquement. Les permanences, par exemple,
lieu découte et dinformation, doivent pouvoir être un lieu de contacts
aisés entre tous les membres. Lassociation met à disposition des structures, des
moyens, de linformation dont limpact sera lié à la facilité dy
accéder, à la proximité.
Ceci signifie quune
organisation régionale est déjà trop distante dune grande partie des personnes
qui en attendent quelque chose. Souvent, dans ce cas, ces personnes se sentent laissées
pour compte et ne participent à aucune activité ou réunion dinformation,
sil y en a. Les « correspondants », comme il en est parfois en
association, peuvent avoir un rôle à tenir mais ils ne resteront que des relais entre le
service compétent et le malade. Le téléphone et autres moyens de communication ne
remplaceront jamais les échanges en « face à face » et le dialogue ne pourra
être aussi riche.
La structure géographiquement la
plus proche semble être la structure départementale même sil existe toujours des
secteurs moins bien desservis que dautres. Des pôles daccueil peuvent être
envisagés, leur fonctionnement étant assuré par des membres du bureau. Il ne faut pas
non plus oublier que de nombreuses personnes habitent sur un département qui nest
pas celui de leurs activités. Il ne faut donc pas que les associations aient une attitude
stricte quant au lieu dadhésion. Ce qui compte cest ladhérent et ce
quil peut trouver au sein de lassociation. La limite géographique est liée
à ses habitudes et à ses possibilités de déplacements.
Si, dans labsolu, des
associations dun secteur géographique proche proposent un panel dactivités
similaires dun lieu à un autre, il devient possible à ladhérent de
participer à telle ou telle activité, quelle que soit lassociation initiatrice. Le
seul critère de choix étant la facilité de déplacement que rencontre ladhérent
pour se rendre sur tel ou tel site dactivité. La mise en place dactivités,
comme leur gestion, nécessite une structure associative qui agisse en ce sens et
développe ces actions selon les besoins locaux, en fonction des possibilités
matérielles et humaines. Aucune organisation de malades ne peut avoir la souplesse
suffisante pour démarcher, rencontrer, convaincre et finaliser des activités dans des
lieux trop écartés de sa base.
Il est préférable dinduire la
création dautres associations, dinformer, de soutenir les personnes
désireuses de sinvestir dans le bénévolat pour apporter, près de chez eux, les
moyens déjà efficaces ailleurs. Une trame associative peut alors se constituer et
permettre ainsi un partage des expériences, lorganisation de rencontres
dinformation médicale et para-médicale, une aide plus rapide et plus diversifiée
envers les malades, un développement des partenariats
Ceci sous-entend que lesprit
hégémonique, auquel nous avons trop souvent assisté, soit oublié et, quau
contraire, chaque association favorise la
création dune autre dans les départements limitrophes. Informer les personnes qui
nous contactent, leur expliquer le fonctionnement dune association, fournir la
documentation nécessaire sur la législation, avoir des statuts communs, un règlement
intérieur commun et une charte définissant nos relations, permet de développer un
réseau dassociations en parfaite harmonie.
Le recouvrement du territoire par des
associations à taille humaine permettra encore plus aisément aux adhérents de sy
investir. Il nest pas nécessaire de disposer de beaucoup de temps mais dêtre
pleinement désireux de consacrer du temps à son association dans le cadre ainsi
existant. Plus les personnes se sentiront concernées, plus il y aura defficacité
dans la mise en place des activités, plus les tabous autour des associations de malades
tomberont et plus le regard des médecins sera positif jusquau point où un
partenariat entre soignants et lassociation se développera, comme lA.M.D.C.F.
44 le vit maintenant.
A ce stade, le sérieux de nos
orientations est largement constaté, nos propos sont entendus et partagés, notre
représentativité est reconnue. De ce fait nous pouvons développer nos intentions et en
débattre. Des spécialistes nous accompagnent dans nos démarches et participent, avec
nous, à linformation de leurs confrères quils soient hospitaliers,
libéraux, médecins du travail ou de caisse primaire. Cest là que nous
récupérons un des fruits de notre travail. La prise de conscience quont de plus en
plus de médecins sur la réalité de la vie du malade douloureux chronique ne peut se
faire que par lexplication par des professionnels dans un contexte professionnel.
Quel que soit notre savoir nous
devons être parfaitement conscients que ce nest pas nous qui pourrons être
crédibles auprès des médecins et cest tout à fait logique en soi ! Notre rôle,
à ce niveau, doit être de centraliser des connaissances quand nous en sommes informés
et de transmettre celles-ci aux spécialistes, qui les valideront ou non. Surtout, nous ne
devons jamais laisser entendre lexistence de « découvertes » ou de
« nouveaux traitements » auprès des adhérents avant même quil
ny ait eu une étude précisant la valeur de ces découvertes ou de ces traitements.
Il ny a rien de pire que de laisser courir un espoir qui sera détruit peu de temps
après
et il en va encore de notre crédibilité.
Il découle également de tout cela
que les revendications, souvent tous azimuts, qui dépassent les possibilités que les
connaissances actuelles permettent, sont à proscrire. Des pétitions sont parfois
proposées. Comment écrire ce qui nest pas connu, comment prendre en charge et de
façon stéréotypée, des malades atteints dune maladie encore mal définie.
Leffet sur les destinataires ne peut être que le rejet.
Si un jour un regroupement au niveau
national doit avoir lieu, il doit se faire à partir dun accord entre les
associations existantes, à partir de regroupements de malades, mieux encore à partir
dun réseau dassociations de proximité, dans le respect dune éthique
associative. Personne nest en droit de sapproprier un rôle au nom de toute
autre personne sans quelle en soit informée. Une représentativité nationale doit
obéir aux règles associatives et ses représentants doivent être élus régulièrement
par les structures que ces candidats se proposent de représenter, leurs objectifs ayant
été clairement formulés et ayant reçu lapprobation des électeurs.
Lexpérience, encore dactualité, que les malades vivent au travers
dinstances « auto-formulées nationales » est douloureuse. Cest un
drame pour les malades qui ont été leurrés, cest un drame pour ceux qui
travaillent à aider ces malades, cest un drame pour les médecins qui les
soutiennent et qui participent à linformation de leurs confrères.
Par expérience, le travail local que les associations de
proximité peuvent développer sera le meilleur moyen de se faire connaître et
reconnaître. Il ny aura pas besoin dinterlocuteur auprès de telle ou telle
instance, ce sont nos médecins et leurs tutelles qui auront fait passer le message. La
reconnaissance de la fibromyalgie ne va pas se gagner dans la rue, ni par quelques actions
violentes, mais par notre participation à préciser la maladie et à démontrer limpact sur la vie du malade.
Nettoyons devant notre porte et montrons bien que ce nest pas la recherche de
compensation financière ou la recherche dun ego flatté qui nous motivent, mais la
reconnaissance dun statut dans le cadre social pour que, plus jamais, des malades
douloureux se sentent rejetés de la société au point den perdre la vie.